« Fraude et Conformité : L’état des lieux des réglementations en cours et à venir »

22 juin 2017

Partager l'article :

Sommaire

gerard drancourt complianceLe 27 juin prochain, Altares organise une matinée sur le thème : « Fraude et conformité : la réponse digitale aux enjeux réglementaires ». Pour en savoir un peu plus et défricher ce vaste sujet, nous avons interviewé Gérard Drancourt, en charge de la compliance chez Altares et intervenant sur cette conférence.

Bonjour Gérard, quel est l’état des lieux sur les sujets de la fraude et de la corruption aujourd’hui, tant en France qu’à l’étranger ?

Le seul domaine de la corruption se chiffre à 1000 milliards de dollars dans le monde, soit 5% du PIB mondial. Le blanchiment, lui, fait état de 2000 milliards de dollars ! Ces montants donnent un peu le vertige surtout quand on sait qu’une part non négligeable de ces sommes sert à financer le terrorisme et d’autres activités illégales. Concernant les textes, la France doit rattraper son retard sur les Etats-Unis, par exemple, qui sont dotés d’un texte contre la corruption, le FCPA (Foreign Corrupt Practices Act) depuis 1977 et le Royaume-Uni qui est doté depuis 2010 du UK Bribery Act.

Concernant la loi Sapin 2, la plupart des décrets d’application datent du début de cette année. Sur les sujets de la fraude et de la corruption, on constate une évolution un peu paradoxale : cela concerne de plus en plus de monde mais le nombre d’acteurs compétents pour faire face n’a que très peu évolué.

Par ailleurs, on durcit les process et les sanctions mais certains textes laissent planer un certain flou. L’ACPR (Autorité de Contrôle Prudentielle et de Résolution, organe de supervision français de la banque et de l’assurance) a émis des « lignes directrices » qui peuvent laisser une part d’interprétation. Concernant, par exemple, la recherche du bénéficiaire effectif, qui est une des clés de voute de la lutte contre le blanchiment, le texte dispose que : « Les entreprises assujetties sont tenues d’identifier par des moyens adaptés l’identité des bénéficiaires effectifs et de veiller à ce que des efforts raisonnables soient effectivement mis en œuvre ». Ça mérite des précisions ! Les mêmes questions risquent de se poser lorsque l’AFA émettra ses lignes directrices sur SAPIN 2.

L’entreprise, justement, parlons-en. Quelles sont celles qui sont concernées et, en leur sein, quelles sont les activités les plus exposées ?

C’est une erreur de penser que seul le secteur de la finance est concerné par la compliance : toutes les entreprises le sont, de même que les établissements publics et les administrations. Il est plus intéressant de savoir d’une part celles qui, de par leur activité quotidienne, sont les plus exposées et d’autre part celles qui ont les moyens de faire face à ces nouvelles obligations réglementaires.

Par exemple, on peut raisonnablement penser qu’une entreprise de fret international, un cabinet d’avocats fiscalistes ou une banque offshore ont plus de chances d’être exposés à la corruption qu’un groupe de presse ou qu’une TPE de coutellerie, mais bien qu’elles soient toutes soumises aux mêmes règlements et aient les mêmes obligations, elles ne disposent pas toutes des mêmes moyens.

Ce sont logiquement les plus petites entreprises qui sont les plus démunies car elles ne disposent pas de moyens humains et/ou financiers ni de process pour traiter ces sujets et par ailleurs, leurs principaux interlocuteurs que sont les CFE ou les experts-comptables ne sont pas assez sensibilisés à ces questions. Dans cette configuration-là, il est préférable d’avoir recours à des prestataires tiers de confiance externes capables d’apporter du conseil et des solutions expertes. Les établissements de plus grande taille sont généralement dotés de métiers directement liés à la conformité (Compliance Officer, Responsable Juridique, Risk Manager, Auditeur Interne) sur lesquels on ne reviendra pas ici. A mon sens, les deux secteurs de l’entreprise les plus potentiellement exposés sont celui des commerciaux et le département des achats : on ne peut pas vendre, on ne peut pas acheter à n’importe qui (entreprise et/ou pays) ; de même les dessous de table, pots de vins ou autres trafics d’influence sont bien entendu à proscrire. Cela nous parait évident mais il n’est pas rare qu’une entreprise doive traiter avec des pays où ces usages sont parfaitement naturels.

Quels sont les risques et les sanctions pour tous ces acteurs ?

On ne peut évidemment pas aborder le secteur public et le secteur privé de la même façon, même si les risques de corruption et de fraudes sont, dans l’absolu, équivalents. Aux USA, par exemple, la réglementation principale ne porte que sur la corruption d’un agent public. En France, difficile de passer à côté des différentes mesures liées à la transparence dans la vie publique aussi bien pour les organismes privés que pour les élus ou les personnes étant amenées à prendre des responsabilités publiques importantes. Pour les acteurs privés, les sanctions peuvent être aussi bien administratives que financières ou même pénales, sans parler du risque d’image très important : certaines affaires de collusions locales entre des grands groupes et des groupuscules peu recommandables, par exemple, peuvent se solder par un changement de casting à la direction générale … Que ce soit pour de la fraude, de la corruption, du blanchiment ou du financement du terrorisme, les sanctions peuvent aller jusqu’à des peines de prison ferme (10 ans) et d’importantes amendes (plusieurs centaines de millions d’€). Enfin, les instances régulatrices et de surveillance sont déjà nombreuses en France mais il a été décidé récemment de créer l’Agence Française Anticorruption (AFA) qui est le « bras armé » de la loi Sapin 2 directement sous la double tutelle du ministre de la justice et celui des finances et qui regroupe des compétences de recommandation, de détection et de contrôle des faits de corruption.

Qu’en est-il des réglementations à l’international et comment s’articulent-elles ?

Il est vrai qu’il y a encore des disparités entre les pays qui luttent activement contre ces problèmes. Néanmoins, on retrouve des tendances de fond communes : – renforcement des sanctions – le souci permanent de la connaissance du tiers à travers des textes qui imposent d’aller de plus en plus loin dans la connaissance du bénéficiaire effectif (UBO, Ultimate Beneficial Owner). – l’émergence des nouvelles technologies (principalement liées au traitement de la data) qui permettent de répondre plus efficacement à ces nouvelles exigences. – la notion de victime lésée est maintenant mise en avant dans les législations sur la corruption : en cas de collusion entre deux parties, la ou les victimes peuvent faire un recours auprès du régulateur, ce qui n’était pas le cas avant. – les textes communautaires priment, sauf exceptions, sur les textes nationaux : la 4ème directive européenne anti-blanchiment et financement du terrorisme entrée en vigueur depuis le début de l’année découle elle-même d’une recommandation du GAFI (Groupement d’Action Financière Internationale), sera respectée dans tous les pays de l’UE. Autre exemple : le RGDP (Règlement Général sur les Données Personnelles) qui entrera en action en mai 2018 se substituera en grande partie aux textes de la CNIL française. Ce qu’il est en revanche intéressant de noter c’est que tous ces arsenaux réglementaires fournissent des munitions dans une guerre de pouvoir entre les Etats qui ont, de fait, à leur disposition des textes leur permettant de protéger leurs entreprises ou de nuire aux entreprises étrangères. Les cas ne sont pas rares où les Etats-Unis, par exemple, vont sanctionner avec un zèle exemplaire des entreprises françaises ou européennes sur des sujets de fraude. La réciproque étant vraie, je me garderai bien de faire des commentaires !

La matinée « Fraude et conformité : la réponse digitale aux enjeux réglementaires » se tiendra le mardi 27 juin de 10h00 à 14h00 à l’Hôtel Peninsula à Paris.




Altares Dun & Bradstreet

Altares Dun & Bradstreet

Expert de l’information sur les entreprises, Altares collecte, structure, analyse et enrichit les données BtoB afin de les rendre « intelligentes » et faciliter la prise de décision pour les directions générales et opérationnelles des entreprises. Le groupe propose son expertise sur toute la chaine de valeur de la data. Partenaire exclusif en France, au Benelux et au Maghreb de Dun & Bradstreet, 1er réseau international d’informations BtoB, Altares se positionne comme le partenaire de référence des grands comptes, ETI, PME et organisations publiques, en leur offrant un accès privilégié à ses bases de données sur 500 millions d’entreprises dans 220 pays.

Bienvenu sur notre espace d’aide en ligne, veuillez choisir une des options ci-dessous.

Prenez rendez-vous avec un expert