Après les principaux partis politiques, le Medef et diverses autres grandes organisations, c’est au tour de l’Ordre des experts-comptables de tenir son université d’été, du 5 au 8 septembre à Paris Descartes dans le 6ème arrondissement.
Quand on voit quels sont les speakers qui figurent en tête de gondole: Idriss Aberkane, le wonderboy des neurosciences, Laurent Alexandre (certains diront Alexcassandre), le prophète de l’IA et Gilles Babinet, entre autre digital champion français auprès de la Commission européenne, on se dit que la barre a été placée très haut en termes de discours « inspirationnels ».
De même, quand on prend connaissance de l’intitulé de certaines conférences : « IA, robotique, big data : quels impacts et quelles solutions pour nos cabinets ? », « le rebond, faire de l’échec un moteur » ou encore des ateliers traitant du cloud hybride, de la blockchain ou de l’uberisation de la profession comptable, on se demande si les organisateurs ne veulent pas faire partir, là tout de suite, une partie de leurs confrères en retraite anticipée.
La grande majorité des sujets sont en effet pour le moins…disruptifs.
Même si cette transition, à la fois technologique et culturelle, n’est pas sans frictions pour cette profession patrimoniale, le fait de vouloir résolument faire bouger les lignes (de code) est une excellente nouvelle pour tous ceux qui pensent qu’un comptable n’est qu’une contrainte nécessaire.
Néanmoins, ce qui pourrait être la chronique d’une mort annoncée pourrait au contraire s’avérer être une réelle opportunité de rebond.
Dans ce contexte bouillonnant, Altares prenait la parole mardi 5 à l’occasion d’un atelier sur le thème : « Du Big Data à la Smart data : Comment transformer les données en opportunités » et présenté par Didier Louro, directeur des pôles métiers en compagnie de Frédérique Lefaudeux, data scientist et Hervé Gbego, expert-comptable et par ailleurs chargé de l’innovation au sein de l’Ordre.
Après une première partie resituant les chiffres, les nouveaux usages, les speakers ont insisté sur les nouveaux enjeux de la profession, surtout un, et non des moindres : comment faire face aux nouvelles technologies qui, à terme, les priveront des tâches les moins valorisantes (la tenue de compte par exemple), l’évocation du bot Amelia ayant d’ailleurs provoqué un léger frisson dans l’assemblée.
L’intervention a ensuite porté sur des use cases reprenant des sujets que la profession traite au quotidien :
– La mise en application des mesures de la loi Sapin 2 qui fait ressortir, dans la démarche KYC, le rôle prépondérant de l’expert-comptable comme tiers de confiance du tissu économique en France (des mots mêmes du président Macron).
– Le pilotage intelligent du DSO (CA facturé non encaissé, indicateur du risque client et composante du besoin en Fonds de Roulement)
– L’optimisation du risque client et comment la data science améliore les process et apporte de la valeur dans la qualité de la relation par du conseil stratégique.
– Comment optimiser les recouvrements grâce aux algorithmes.
D’autres sujets clés ont été également évoqués, comme la réforme des bilans confidentiels et quel bénéfice cela pouvait avoir sur la profession.
A la lumière de cette intervention, une question (polémique) se pose : les données comptables sont la traduction des flux économiques et financiers des entreprises et pourtant les cabinets n’en font profiter, et c’est logique, que leurs clients.
Alors poussons le raisonnement jusqu’au bout : Et si l’Ordre des experts-comptables devenait un provider de data ? La boucle serait bouclée et une nouvelle logique économique verrait le jour.
Pour conclure, on s’aperçoit que le vrai challenge pour la profession est double : s’adapter à leurs clients qui opèrent eux-mêmes leur transformation digitale (acquisition de nouvelles compétences et création de nouveaux services) avec les bouleversements que cela induit et rassurer ceux qui, pour diverses raisons, n’osent pas franchir le pas.
Ce dernier point est d’autant plus délicat que l’expert-comptable est dans une situation identique à ses clients et qu’il est difficile de rassurer quand on est soi-même en plein doute.