Avec ce nom de super-héros très vintage, cette startup parisienne entend bien secouer l’univers de la comptabilité d’entreprise et plus précisément, celui des experts-comptables et des commissaires aux comptes.
Les deux fondateurs de Supervizor, Alban Clot et Cyrille de Gastines (ex-EY), sont partis du constat que, parmi les dizaines de millions d’enregistrements comptables générés chaque année, des erreurs étaient inévitablement commises du fait des multiples intervenants dans la comptabilité de l’entreprise et de systèmes d’information hétérogènes.
Face au manque de solutions proposées par les professionnels du secteur, les deux entrepreneurs se ruent dans la brèche et, au terme d’un long processus de recherche et développement, ils mettent au point, en 2014, une solution d’automatisation de la vérification des données comptables pour repérer, en temps réel, les erreurs contenues dans la comptabilité.
Dans un contexte où l’administration fiscale, depuis le 1er janvier, multiplie les contrôles dématérialisés à partir du fichier des écritures comptables (FEC), c’est-à-dire la comptabilité informatisée des sociétés, l’inquiétude grandit chez les grands entrepreneurs comme les petits, jamais certains à 100% de la fiabilité de leur comptabilité.
La proposition de valeur de cette « AuditTech » séduit assez rapidement les entreprises (de toutes tailles, des grands groupes aux PME) puisque Supervizor compte aujourd’hui 250 clients (sans compter les filiales) et vient de lever 3 millions d’euros auprès du fonds Odyssée Venture.
Une lecture un peu premier degré de son activité a fait passer la startup pour une aide aux fraudeurs fiscaux puisque le logiciel permet (aussi) de détecter les erreurs liées aux anomalies dans les déclarations faites par leurs clients mais elle préfère se définir elle-même comme un facilitateur de relations entre l’administration fiscale et les entreprises (dixit : « un compteur de vitesse plutôt qu’un détecteur de radar »).
Et même si certains syndicats de Bercy restent circonspects sur la démarche, certainement un peu trop novatrice et disruptive à leur goût, la solution est plébiscitée par les chefs d’entreprise d’autant plus que le logiciel est installé chez le client et non, pour des raisons évidentes de confidentialité, dans un cloud.
Le positionnement et le service de Supervizor met également en lumière un sujet que nous avons déjà évoqué sur ce blog : le remplacement progressif, mais inéluctable, de certaines tâches de l’expert-comptable par des logiciels dopés au machine learning. A l’instar de solutions d’IA qui permettent d’établir certains diagnostics de pathologies avec une marge d’erreur inférieure au traitement humain, la détection d’erreurs dans les comptabilités des entreprises est le type même de mission chronophage et sans beaucoup d’intérêt (pour celui qui l’opère, pas celui du client) que l’on peut transférer à la machine.
A suivre donc de très près.