Alors que le taux de chômage est prévu en légère hausse en 2025, les acteurs de l’emploi tirent la sonnette d’alarme tout en appelant à l’action collective. Décryptage d’une situation tendue mais loin d’être désespérée, évoquée dans le podcast de Martial You sur RTL.
Le marché de l’emploi en France traverse une zone de turbulence. D’après François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, le taux de chômage devrait passer de 7,3 % aujourd’hui à « entre 7,5 et 8 % » dans les mois à venir. Un chiffre encore loin des 10 % enregistrés lors de la crise précédente, mais qui inquiète tout de même à l’heure où les défaillances d’entreprises repartent à la hausse.
Faillites d’entreprises en hausse, emplois menacés
Thierry Millon, directeur des études Altares, alerte : au premier trimestre 2025, la France a enregistré 17 845 défaillances d’entreprises, une augmentation de 4,4 % par rapport à l’an passé. Résultat : 71 000 emplois sont directement menacés, un niveau inédit depuis la crise financière.
Ce sont principalement des PME, parfois de grande taille, qui tombent. Certains secteurs historiquement fragiles comme le bâtiment ou l’automobile sont à nouveau touchés, mais la nouveauté vient des secteurs sociaux : associations, aide à domicile, accompagnement à l’emploi, etc. Ces structures, souvent implantées en région, emploient beaucoup de personnel et leur disparition crée un choc local important.
Un retournement prévisible ?
Aurélie Feld, Président de LHH France (Groupe Adecco), relativise la brutalité du retournement, en partie attendu. Depuis 2021, les aides liées au Covid ont maintenu artificiellement en vie des entreprises fragiles. Leur retrait permet un ajustement, parfois brutal, à une nouvelle réalité post-pandémique.
Agir localement, accompagner massivement
Face à ces difficultés, France Travail (ex-Pôle Emploi) veut incarner une réponse de terrain pour l’emploi en France. Son directeur général, Thibaut Guilluy, insiste sur le fait que le chômage ne doit pas être une fatalité. Depuis janvier, 160 000 entreprises ont été accompagnées par l’organisme. 70 % des recrutements ont lieu dans de petites structures sur lesquelles il faut porter son attention.
Avec le basculement du RSA vers une logique d’accompagnement renforcé, de nombreux demandeurs d’emploi sont désormais suivis. Les immersions professionnelles, la formation ciblée, les recrutements par simulation sont autant d’outils mobilisés pour reconnecter les candidats aux besoins réels des entreprises.
Des signaux positifs
Malgré la hausse du chômage, le taux d’emploi en France a fortement progressé, passant de 63 % à 69 % en moins de dix ans. Les plus de 55 ans notamment sont de plus en plus actifs, preuve d’un changement de mentalité et d’un besoin croissant de s’adapter.
Par ailleurs, le nombre de CDI signés est en hausse pour la première fois depuis 2022, et certaines filières connaissent un regain d’activité : construction, nucléaire, industrie de défense, santé, recyclage, batteries, énergies renouvelables…
Les besoins en main-d’œuvre restent élevés, avec 50,1 % des entreprises qui anticipent des difficultés de recrutement. Un paradoxe en apparence, mais qui s’explique par une inadéquation entre compétences disponibles et postes à pourvoir.
Former pour mieux rebondir
Face à ce constat, l’enjeu est clair : former plus et mieux. Thibaut Guilluy rappelle que la formation augmente de 17 points les chances de retour à l’emploi chez les seniors. France Travail mise sur les reconversions, l’accompagnement individuel, et une stratégie fine, adaptée aux réalités des territoires.
L’idée ? Construire une économie circulaire de la compétence, où chaque suppression de poste s’accompagne d’un parcours de rebond vers un nouveau métier. Cela demande une coordination renforcée entre acteurs publics, entreprises, associations et collectivités locales.
Le chômage, une fatalité ?
La France est-elle condamnée à un chômage structurel autour de 7 % ? Pas forcément. Mais le chemin vers le plein emploi (4-5 %) est semé d’embûches. L’équation est complexe : accompagner les entreprises fragiles, réformer le système d’accompagnement, anticiper les transitions industrielles, et surtout former les actifs tout au long de la vie.
Le marché de l’emploi en France et dans le monde évolue vite et nécessite de ne pas rester figé dans d’anciens schémas. Car s’il y a bien une constante dans les témoignages des acteurs de terrain, c’est celle-ci : l’emploi se gagne sur le terrain, au plus près des besoins, avec de l’écoute, de l’adaptation et de l’action.