Dans un contexte économique tendu, la gestion du poste client redevient une priorité stratégique pour les entreprises. Entre retards de paiement persistants, trésoreries fragilisées et hausse structurelle du risque de défaillance, l’heure est à la prudence et à l’optimisation des processus internes.
Les défaillances à un niveau élevé
L’année 2024 a été marquée par une pression exceptionnelle sur la solidité des entreprises. Avec 67 830 défaillances recensées sur l’année, la situation reste préoccupante. Toutefois, un signal positif se dessine : Thierry Millon, directeur des études chez Altares, observe que la trajectoire de hausse s’est nettement ralentie. En effet, le rythme d’augmentation a été divisé par deux sur douze mois (+17 % en 2024 contre +36 % en 2023), avec un dernier trimestre en croissance modérée (+10 %). Les premiers mois de 2025 confirment cette tendance vers une forme de stabilisation, autour de 6 000 défaillances par mois – un niveau élevé, mais constant.
Ce ralentissement n’efface pas pour autant la fragilité croissante des structures de taille intermédiaire. Les PME et ETI de plus de 50 salariés subissent une hausse des défauts plus rapide que la moyenne. Depuis l’an dernier, on constate que les entreprises du BtoB, notamment celles en lien avec le BtoC, subissent des pressions accrues. Certaines paient encore le prix du remboursement de leur PGE, d’autres peinent à absorber l’augmentation de leurs charges ou à suivre des cadences de production élevées.
Cependant, il faut souligner que le risque ne pèse pas de façon homogène sur tous les secteurs : certains concentrent l’essentiel des difficultés, comme le commerce, la construction, l’hébergement-restauration ainsi que les services aux entreprises, qui cumulent à eux seuls près de 70 % des défaillances. Une concentration qui rappelle l’importance de l’analyse sectorielle dans l’évaluation du risque client.
Une pression supplémentaire sur les trésoreries
La conjoncture actuelle ne joue pas en faveur des entreprises. Une croissance en berne, des tensions géopolitiques et une potentielle guerre commerciale liée à l’augmentation des droits de douane américains pèsent sur les marges et les flux de trésorerie, et pourrait constituer le principal facteur de risque pour les mois à venir.
Dans ce contexte, les délais de paiement repartent à la hausse. Selon les études, les retards de paiement dépassent désormais les 14 à 17 jours. Or, un quart des défaillances d’entreprises est directement lié à ces retards. La rigueur dans la gestion du poste clients est donc plus que jamais essentielle.

Anticiper et surveiller le risque client
La prévention commence par la connaissance, ce qui implique une surveillance continue de la solvabilité des clients, à l’aide de données fiables : bilans, comportements de paiement, niveau d’endettement, etc. Des acteurs comme Altares proposent à ce titre des solutions d’évaluation du risque.
À ces analyses externes doivent s’ajouter les informations terrain : les retours des commerciaux sont précieux pour détecter les signaux faibles. Les assureurs-crédit, enfin, jouent un rôle clé. En évaluant en amont la santé financière des tiers, ils apportent une sécurité supplémentaire. En cas de défaillance, leur indemnisation permet de limiter les impacts sur la trésorerie.
Structurer sa gestion du poste clients
Prévention et couverture ne suffisent pas sans une stratégie claire. Cela passe par une politique de crédit adaptée à chaque typologie de client, avec des conditions de règlement évolutives selon le niveau de risque identifié. Demande d’acompte, paiement à la commande ou réduction des délais doivent être envisagés pour les clients fragiles.
Une facturation rapide, un suivi rigoureux des encours et une coordination fluide entre équipes commerciales, finance et comptabilité sont également indispensables. En cas de retard, la balance âgée reste un outil de pilotage essentiel. Il convient ensuite d’activer les leviers de recouvrement, à l’amiable ou par voie judiciaire si nécessaire. Des spécialistes peuvent à ce titre être mobilisés pour ces étapes critiques.
Levier final : l’affacturage
Pour accélérer les rentrées de cash, le recours à l’affacturage reste une option précieuse. Ce mode de financement à court terme permet d’obtenir rapidement des liquidités via la cession de créances. Il s’accompagne souvent de services complémentaires, comme la relance ou l’assurance-crédit.
Philippe Mutin, directeur général de Crédit Mutuel Factoring et Factofrance, observe que « les entreprises anticipent davantage et sollicitent l’affacturage par précaution, face à des tensions de trésorerie actuelles ou potentielles ».
Dans un contexte de guerre économique naissante et de pression accrue sur les chaînes d’approvisionnement, les besoins de financement court terme vont sans doute encore s’intensifier, notamment dans des secteurs stratégiques comme la défense.
Retrouvez l’article original auquel a participé Thierry Millon, Directeur des études chez Altares, dans le journal en ligne GPOmag.